Un plan de carrière imparfait
Quand j’étais jeune, je me disais, ou plutôt mes professeurs me disaient qu’il fallait faire de longues études pour avoir un travail intéressant et qui paie bien.
Sur leurs conseils, j’ai donc arpenté les couloirs d’une classe préparatoire HERC à Strasbourg, assez réputée et qui m’a envoyée vers d’autres couloirs : ceux d’une grande école de commerce.
Mon professeur d’économie dénigrait bien volontiers ce genre d’établissement où, disait-il les étudiants se prenaient pour des êtres supérieurs alors qu’ils n’étaient que des fils et filles de…
Dans mon cas, mes parents ne savent ni lire ni écrire et je n’ai connu l’existence des écoles de commerce qu’en allant en classe préparatoire.
C’est aussi là que j’ai découvert leur coût exorbitant mais bon…passons…
Bref, tout cela pour dire que le plan était de morfler un bon coup pour ensuite être récompensée de ses efforts.
Ce n’est pas exactement ce qu’il s’est passé…
La quête de sens
J’ai continué à morfler sans en voir le bout j’ai l’impression.
Je n’avais pas compris que sans le réseau, un diplôme comme celui-là, ne vaut pas grand-chose.
Vous êtes encore moins vernis si vous êtes en province, une femme, issue de l’immigration…n’en jetez plus, la coupe est pleine…
Je n’ai donc pas trouvé le travail idéal en sortant de mon école de commerce, pourtant réputée.
J’ai travaillé pour de grands groupes dans la grande distribution mais j’avais l’impression que mon diplôme le plus valorisé était mon permis de conduire car il s’agissait de faire des milliers de kilomètres par an pour visiter les hyper et supermarchés de mon secteur.
J’ai trouvé un poste dans le social car j’étais en quête de sens mais force tait de constater que je voulais devenir entrepreneure. Le hammam et ses nombreuses vertus m’a toujours passionné.
Synonyme de bien-être et de beauté, il symbolise l’endroit secret des femmes maghrébines, là où elles peuvent être enfin libres.
La création d’entreprise
Créer un institut de beauté suppose de s’immatriculer à la chambre de commerce. Comme il s’agit d’une profession réglementée, il faut soit avoir un(e) salariée détentrice du CAP esthétique ou l’avoir soi-même.
Lorsque j’ai lancé le projet « Hammam et Rituels » entre les dossiers bancaires, accessibilité, sécurité, suivre les travaux, embaucher et former les salariés, je ne pensais pas avoir le temps ni l’énergie de passer ce diplôme.
En 2021, je me suis quand même inscrite en candidat libre. Je me suis dit que je verrai bien. Les mois et l’accumulation de soucis ont défilé et je me suis résignée à me réinscrire…peut-être.
Finalement en embauchant mes 2 dernières salariées, je leur ai parlé de ce projet. Il restait 2 mois pour me préparer.
Elles m’ont coaché comme il se doit. J’ai écouté et emmagasiné les informations. J’ai fait appels à des modèles qui se sont prêtées au jeu. J’ai trouvé ma modèle 1 mois avant les épreuves…
Se préparer à l’épreuve du CAP
Bizarrement, je n’étais pas vraiment stressée.
Il faut dire que j’avais déjà l’expérience d’un CAP : j’avais déjà passé le CAP carrelage il y a quelques années, mais cela est une autre histoire.
Je me suis dit que je ferai de mon mieux et au pire je l’aurai l’année prochaine, c’est sûr.
Finalement, les 2 épreuves pratiques qui, me faisaient le plus peur se sont relativement bien déroulées.
Je dois dire que le vernis à ongles et les manucures, pédicures ne sont pas ma tasse de thé et j’ai limité la casse.
Je me suis retrouvée avec des jeunes de 16 ou 17 ans qui devaient absolument avoir leur CAP sous peine « de ne plus pouvoir voir leur copain » ! J’ai également fait la connaissance de personnes qui passaient aussi le diplôme en candidat libre et nous étions heureuses de pouvoir partager nos expériences.
Il a fallu apprendre par cœur des termes de biologie, s’astreindre à respecter un protocole précis, connaître les spécificités des différentes peaux…tout en continuant mon entreprise. Ce n’était pas une mince affaire mais je l’ai fait et j’en suis fière.
Je pense que ce qui m’a le plus aidé c’est mon expérience et mon sens des priorités et surtout, je savais pourquoi je devais passer ce diplôme.
Il a un sens, et par ce biais, les efforts fournis sont moins lourds.
C’est ce que cette expérience m’a appris : savoir pourquoi on fait les choses les rend faciles.